Contexte
Les pays de la région déploient des Conseils et Fonds pour l’élimination du paludisme appartenant aux pays et dirigés par les pays. Ces Conseils et Fonds réunissent des hauts dirigeants de tous les secteurs (public, privé et société civile). Ils ne remplacent pas le PNLP sur le plan des opérations, mais fournissent une tribune précieuse où le PNLP peut faire remonter les goulots d’étranglement (par exemple, les déficits budgétaires) et coordonner une réponse multisectorielle pour lutter contre le paludisme. Les membres des Conseils et Fonds défendent ainsi des initiatives comme « Zéro Palu ! Je m’engage »:
- en faisant en sorte que le paludisme reste une priorité du programme de développement au niveau des pays
- en incitant à l’action et en mobilisant des ressources pour combler les lacunes dans le Plan stratégique national de lutte contre le paludisme
- en favorisant la redevabilité mutuelle dans tous les secteurs concernant la réalisation des objectifs nationaux pour le contrôle et l’élimination du paludisme
Ils peuvent aussi être établis au niveau sous-national pour encourager les dirigeants locaux et les communautés à prendre la responsabilité de l’élimination du paludisme ainsi qu’à appuyer le travail de plaidoyer, inciter à l’action, mobiliser des ressources et favoriser la redevabilité au niveau local.
En tant que forums multisectoriels chargés d’appuyer le PNLP et le Plan stratégique national de lutte contre le paludisme, les Conseils et Fonds pour l’élimination du paludisme fournissent une occasion unique de diffuser les cartes de score paludisme nationales au-delà du secteur de la santé. Les cartes de score paludisme sont des outils efficaces basés sur des données concrètes qui permettent au PNLP d’attirer l’attention des membres des Conseils et Fonds sur les problèmes et goulots d’étranglement qui se posent au niveau opérationnel, et de susciter des discussions sur leurs causes profondes. Elles mettent en évidence les problèmes transversaux et systémiques (comme les ruptures de stock) au niveau local. Ces informations aident les membres à définir des priorités pour leurs activités de plaidoyer, leurs actions et la mobilisation de ressources. Les membres des Conseils et Fonds peuvent aussi utiliser les cartes de score dans leurs échanges avec leurs secteurs.
Étude de cas : Conseil pour l’élimination du paludisme de la Zambie
La Zambie a lancé son premier Conseil pour l’élimination du paludisme en mars 2019, pendant le mandat de Son Excellence le Président Lungu. Le Conseil est présidé par l’Honorable Ministre de la Santé, et ses membres comptent d’autres ministres, des représentants de l’administration fiscale de la Zambie et de la Banque de Zambie, des dirigeants religieux et traditionnels et des chefs d’entreprises. La Zambie a également établi des Conseils sous-nationaux pour l’élimination du paludisme dans chaque province, ainsi que dans certains districts, afin de promouvoir l’appropriation et la prise de responsabilité au niveau local concernant l’élimination du paludisme.
Le Centre national pour l’élimination du paludisme présente la situation concernant le contrôle et l’élimination du paludisme lors de chaque réunion du Conseil pour l’élimination du paludisme. Cette présentation comprend les dernières réalisations, les goulots d’étranglement et autres problèmes rencontrés par le programme, ainsi que les cartes de score nationale et sous-nationales. La carte de score paludisme de la Zambie permet de comparer les résultats obtenus avec les principaux indicateurs de performance du niveau national au niveau des établissements de santé. Elle est mise à jour chaque trimestre grâce aux données du système de gestion des informations sanitaires (DHIS2) du pays. Les couleurs des feux de signalisation sont utilisées pour indiquer si les objectifs sont en bonne voie de réalisation, si l’indicateur demande une attention particulière ou si les objectifs ne seront probablement pas atteints.
Le fait de partager la carte de score avec les Conseils de niveau national et sous-national permet aux membres de repérer rapidement et indépendamment les goulots d’étranglement systémiques et les problèmes rencontrés dans chaque région géographique sur la base de données empiriques. Le Conseil peut ainsi concentrer ses efforts sur les zones prioritaires, évaluer si ses activités permettent d’améliorer les performances et rendre le Centre national pour l’élimination du paludisme responsable de la réalisation de ses objectifs.
Lors d’une réunion du Conseil pour l’élimination du paludisme en octobre 2019, le Centre national pour l’élimination du paludisme a présenté la carte de score paludisme nationale, qui affichait un très faible taux de femmes enceintes recevant trois doses de traitement préventif intermittent pour femmes enceintes (IPTp3). Les membres du Conseil venant du secteur privé et de la société civile ont interrogé le Centre sur les causes de cette faible couverture. Le Centre a signalé une rupture de stock de SP au niveau national en raison de la perte de financement de partenaires. Le Ministère de la Santé a donc formé une équipe spéciale chargée de veiller à l’approvisionnement durable en SP et les partenaires ont été encouragés à fournir un financement pour restaurer ces services. À la suite de la réunion, des engagements ont été pris et à la réunion suivante, il a été confirmé que 2450 boîtes de SP d’une valeur de 230 000 dollars des États-Unis avaient été reçues et distribuées dans les provinces. L’Initiative présidentielle pour lutter contre le paludisme du Président des États-Unis, dont un représentant assistait à la réunion en tant qu’observateur, a reconnu la nécessité urgente de protéger les femmes enceintes et a changé sa politique de longue date afin d’aider à l’approvisionnement en SP. À la suite de cette intervention, la couverture en IPTp3 est remontée au niveau où elle se trouvait avant la rupture de stock.
D’autres ressources financières et en nature ont été mobilisées par le Conseil à la suite de la mise en évidence des lacunes, dont 500 000 dollars des États-Unis pour soutenir l’administration massive de médicaments, une aide en nature pour le transport des insecticides destinés à la pulvérisation d’insecticide dans les bâtiments et des campagnes de publicité sur les chaînes de télévision et de radio nationales afin de maintenir les niveaux de service en dépit de la crise de la COVID-19.
Étude de cas : Fonds pour l’élimination du paludisme de l’Eswatini
En 2018, Sa Majesté le roi Mswati III a lancé le premier Fonds pour l’élimination du paludisme. Le Conseil d’administration du Fonds est dirigé par une chef d’entreprise du secteur privé et ses autres membres comprennent le Secrétaire principal de la Santé, le Secrétaire principal des Finances, les chefs des organisations paragouvernementales, d’autres responsables du secteur privé et des dirigeants traditionnels. La principale mission du Fonds est de mobiliser des ressources supplémentaires afin de combler les déficits de financement du Plan stratégique national de lutte contre le paludisme et d’aider le Royaume à réaliser son objectif d’éliminer le paludisme de façon durable.
Le Programme national de lutte contre le paludisme de l’Eswatini produit chaque trimestre une carte de score paludisme qui compare les résultats obtenus aux principaux indicateurs de performances relatifs à la surveillance, à la gestion des cas et au contrôle des vecteurs. Les indicateurs comprennent le pourcentage de cas qui ne sont pas signalés dans un délai de 24 heures et examinés dans un délai de 48 heures, la couverture en pulvérisation d’insecticide dans les bâtiments et la conformité aux directives nationales dans le traitement des cas.
À la suite de la nomination du Conseil d’administration du Fonds, le Programme national de lutte contre le paludisme a transmis la carte de score à la directrice et lui en a fait une présentation succincte. Le Conseil d’administration a pris plusieurs mesures relatives aux principaux indicateurs de performance de la carte de score. Il a par exemple encouragé une entreprise locale de télécommunications à remettre en marche le système national de notification concernant les maladies et à offrir gratuitement ses services au programme pendant deux ans. Cela permet aux établissements de santé de continuer à signaler les cas de paludisme dans un délai de 24 heures. Ainsi, 92 % des cas sont signalés dans un délai de 24 heures et 78 % sont examinés dans les 48 heures (T2 2020).
Pour mieux comprendre les lacunes et les problèmes rencontrés par le Programme national de lutte contre le paludisme et leurs conséquences sur les performances au niveau national, le Conseil d’administration et le Ministre de la Santé ont rendu visite aux responsables des établissements de santé et aux entreprises chargées de la pulvérisation d’insecticide dans les bâtiments. Cela a conduit le Conseil d’administration à accroître l’appui et les ressources pour la pulvérisation d’insecticide dans les bâtiments, pour les communications relatives au changement social et des comportements au moyen de publicités et de présentoirs dans les magasins et pour la sensibilisation des dirigeants traditionnels afin de les encourager à mobiliser les populations locales.
Enfin, la présidente du Conseil d’administration a encadré la carte de score et l’a affichée dans son bureau afin qu’elle serve de rappel et d’appel à l’action.
Facteurs de succès clés et meilleures pratiques
- Le Plan national de lutte contre le paludisme présente la carte de score paludisme trimestrielle lors de chaque réunion du Conseil et du Fonds pour l’élimination du paludisme et s’en sert pour orienter la conversation sur les principaux goulots d’étranglement et leurs causes, et en faire des priorités.
- Lorsqu’il y a des goulots d’étranglement, les membres du Plan national de lutte contre le paludisme et du Conseil/Fonds pour l’élimination du paludisme discutent ouvertement des manières de résoudre les problèmes et travaillent ensemble pour obtenir des engagements permettant de les surmonter.
- Les membres du Conseil/Fonds pour l’élimination du paludisme sont formés à l’utilisation de la carte de score paludisme comme outil de plaidoyer auprès de leurs secteurs et s’en servent pour sensibiliser les personnes n’appartenant pas au secteur de la santé aux priorités du Plan stratégique national de lutte contre le paludisme et aux difficultés qu’il rencontre.
- Les membres distribuent la carte de score dans leurs secteurs chaque trimestre afin de les tenir informés de la situation concernant le contrôle et l’élimination du paludisme ainsi que des progrès effectués vers la réalisation des objectifs nationaux.
- Lors de leurs efforts de mobilisation, les membres du Conseil/Fonds pour l’élimination du paludisme identifient la manière dont les engagements se traduiront en amélioration des performances des indicateurs de la carte de score paludisme, puis utilisent les cartes de score comme un outil de suivi et d’évaluation afin de confirmer que leur appui donne les résultats voulus.